Tâtonnements, innovation et impact – un récit sur les solutions d’énergie propre adaptées au contexte zambien
Zambie

Tâtonnements, innovation et impact – un récit sur les solutions d’énergie propre adaptées au contexte zambien

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Ayant pour mission de mettre fin à l’utilisation du charbon de bois pour la cuisson, l’entreprise Emerging Cooking Solutions (ECS) espérait, à travers son approche innovante, réduire le nombre de décès liés à la pollution de l’air et mettre un terme à la déforestation galopante observée en Afrique. L’idée était de commencer par la Zambie, un pays où il est particulièrement difficile de travailler en raison d’une population rurale et périurbaine importante et très dispersée.

Cet objectif ambitieux a cependant dû être ajusté  significativement  car le contexte zambien présentait de sérieux défis. En cherchant des solutions novatrices à des problèmes chroniques, l’entreprise a mis au point des solutions qui  ont fonctionné, d’autres qui ont échoué et d’autres encore qui connaissent un franc succès, contribuant ainsi à améliorer considérablement la vie des Zambiens à travers le pays.

L’Innovation mise au défi

L’entreprise a identifié les pois d’Angole (aussi connue sous le nom de pois cajan, une légumineuse à graines) comme une alternative possible aux granulés de biomasse. « Le pois d’Angole est une plante légumineuse aux propriétés étonnantes, largement consommée en Inde. Elle est particulièrement bénéfique pour la santé et c’est une plante qui pousse dans des sols pauvres. En fixant l’azote, elle permet de régénérer le sol », a expliqué Marion Peterson, cofondatrice et responsable du développement commercial d’ECS. La plante possède une tige ligneuse et des feuilles à haute teneur en protéines, idéales pour le fourrage. Elle est aussi recommandée comme culture intercalaire parce qu’elle améliore la croissance du maïs et réduit la quantité d’engrais à appliquer.

« Nous avions pensé à utiliser les tiges pour fabriquer des granulés et permettre aux agriculteurs d’avoir une culture de rente qui améliorerait leurs revenus. Ils pourraient ainsi acheter nos produits solaires, nos réchauds et nos granulés » a expliqué Peterson. Un programme pilote a donc réuni 200 agriculteurs qui ont « été séduits par l’idée et se sont engagés ». Après avoir été formés, ils ont reçu des graines qu’ils ont intégrées à leurs cultures.

« Malheureusement le marché des pois d’Angole s’est effondré car l’Inde a arrêté d’importer les pois d’Angole. Il n’y avait pas d’autre marché, donc bien qu’ayant fixé un prix et collecté les pois d’Angole pour paiements, nous n’avions plus de marché où les écouler » a poursuivi Peterson. Par ailleurs, tous les agriculteurs n’ont pas suivi les consignes. Certains ont soit planté les graines seules, ou trop tard, voire ne les ont pas plantées du tout. Par conséquent, plusieurs n’ont pas eu de récolte de pois d’Angole à faire valoir comme paiement. « Quant aux tiges, elles constituaient d’excellents granulés mais la production était faible et la logistique de collecte s’est avérée trop complexe et coûteuse ». Malgré un projet apparemment bien ficelé et aux multiples avantages, l’environnement et les changements de tendances à l’international ont compromis la réussite du programme pilote. Les pois d’Angole n’étant plus à l’ordre du jour, cela a permis l’échange d’une autre denrée, le maïs, permettant aux agriculteurs d’échanger leurs récoltes contre des systèmes solaires et des solutions de cuisson propre.

Un peu plus de chaleur « propre »

ECS, qui opère sous le nom de SupaMoto en Zambie, était la première entreprise en Afrique à se lancer  dans l’utilisation de granulés à base de la biomasse résiduelle pour produire de la chaleur, et ainsi développer des alternatives propres et abordables à la cuisson traditionnelle au charbon de bois. Il s’en est suivi la mise au point d’un réchaud financièrement accessible spécialement conçu pour les granulés. Aujourd’hui, ces réchauds sont utilisés dans les ménages ruraux, dans les appartements urbains et dans les grandes cuisines industrielles. Selon ECS, l’entreprise a conçu le « réchaud le plus propre et accessible » au monde.

« Nous fabriquons les granulés à partir des déchets forestiers durables et nous vendons des réchauds qui fonctionnent aux granulés plutôt qu’au charbon de bois. Nos réchauds sont conçus avec un système de combustion interne qui produit des émissions de gaz propres à partir des granulés —produisant une flamme chaude et propre. Cette solution permet de réduire le temps de cuisson de près de 75%, de cuisiner à l’intérieur et d’éviter que le monoxyde de carbone ne se dégage. La flamme de notre réchaud est si forte, qu’elle est plus  économe en énergie qu’un réchaud électrique », a déclaré Peterson.

Cette innovation a suscité un tel  intérêt que  des milliers de réchauds ont été vendus, et que la construction de la première fabrique zambienne de granulés à base de biomasse était nécessaire  pour remplacer l’utilisation du charbon de bois. Avec les solutions solaires, l’entreprise estime que SupaMoto pourrait inspirer de nombreux pays et ainsi changer le paysage énergétique de l’Afrique.

« En cuisinant avec SupaMoto, vous êtes sûrs que ni vous ou votre famille ne respirent des quantités dangereuses de monoxyde de carbone telles que produites par le charbon de bois. Les enfants peuvent également jouer autour du réchaud sans risquer de se bruler. Les membres de votre famille passent beaucoup de temps autour du réchaud, donc nous avons conçu une technologie qui garantit que leur santé est préservée ».

Les granulés sont également jusqu’à 40 % moins chers que le charbon, ce qui semble indiquer que le coût d’un nouveau réchaud sera rapidement rentabilisé – aspect important pour l’entreprise et pour le programme Beyond the Grid Fund for Africa dont elle fait partie.

Un impact « exceptionnel »

Les solutions solaires et de cuisson de SupaMoto ont eu un « impact exceptionnel » sur la vie des Zambiens, a déclaré M. Peterson. « J’ai vu des villages sortir de l’obscurité, des gens disposer de journées plus longues pour travailler et se divertir, et des enfants pouvoir étudier et faire leurs devoirs. Quant au réchaud, les femmes affirment gagner plusieurs heures par jour, et économiser la moitié des revenus utilisés pour le charbon de bois, même en payant progressivement pour un réchaud. Une femme avec une famille de trois personnes m’a confié pouvoir faire toute sa cuisine et fournir de l’eau chaude pour le bain avec 20 kg de granulés par mois. Une autre, avec une famille de neuf personnes, a dit faire la même chose avec 40 kg par mois, soit une dépense de 150 kwacha au lieu de 300 kwacha.

Dans le cadre du Beyond the Grid Fund for Zambia, l’entreprise s’est implantée dans toutes les régions du pays, ciblant les zones rurales pour les solutions solaires et les zones urbaines et périurbaines pour les solutions de cuisson propre.

« En fournissant de l’énergie domestique abordable, renouvelable et de bonne qualité aux populations les plus vulnérables en Zambie, SupaMoto s’attaque à l’un des grands défis qu’est la lutte contre la pauvreté », a déclaré Mattias Olson, Co-fondateur et Directeur général d’ECS.

« Notre approche unique à la cuisson propre et notre modèle d’entreprise innovant pour le solaire hors réseau a nécessité des efforts et des investissements considérables ainsi que des tâtonnements pendant de nombreuses années. Nous en voyons enfin les fruits et nous sommes entrés dans une phase d’expansion rapide. Je suis très enthousiaste à l’idée de savoir que nous sommes désormais en mesure de changer la vie de tant de personnes tout en étant une entreprise durable ». À ce jour, l’entreprise a vendu plus de 9 000 solutions de cuisson propre, 100 réchauds institutionnels et plus de 6 000 systèmes solaires domestiques, tandis que les messages de sensibilisation de l’entreprise sur la déforestation ont permis aux villages de préserver les arbres grâce à une meilleure compréhension des effets néfastes de leur abattage et de son impact sur le changement climatique.

Légende photo : Dorkas, fillette de 8 ans, aide sa grand-mère à préparer le repas à l’intérieur. Auparavant, cette tâche dégageait beaucoup de monoxyde de carbone dans la maison, du fait de la cuisson au charbon. Le réchaud SupaMoto utilise des granulés fabriqués à l’aide de résidus forestiers durables et réduit le temps de cuisson jusqu’à 75 %, permettant d’assainir l’environnement intérieur et extérieur. En réduisant la dépendance au charbon, les clients de SupaMoto contribuent aussi à préserver l’environnement zambien qui a été endommagé par une déforestation importante, principalement pour la collecte du bois de chauffe.

Crédit photo : Jason Mulikita pour le REEEP


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