Promouvoir une gestion responsable des déchets électroniques dans le secteur de l’énergie hors réseau : l’approche du Beyond the Grid Fund for Africa

Promouvoir une gestion responsable des déchets électroniques dans le secteur de l’énergie hors réseau : l’approche du Beyond the Grid Fund for Africa

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La gestion durable des déchets électroniques solaires est une priorité émergente pour le secteur hors réseau en Afrique. En général, un système solaire domestique se compose d’un ou de plusieurs modules photovoltaïques (PV), de composants destinés à éclairer ou à charger des appareils électriques, et d’une batterie de stockage. Selon la qualité des composants, ces produits sont généralement utilisés pendant 3 à 5 ans. Ceci dit, la remise à neuf et le remplacement ciblé des composants sont des pratiques émergentes, et elles permettent d’augmenter considérablement la durée de vie de l’ensemble du système.

Les installations de mini-réseau sont beaucoup moins coûteuses et ont  un faible impact sur l’environnement car le poids de la batterie est négligeable par rapport au poids de l’installation totale, et elles ont une durée de vie physique beaucoup plus longue. Les défis environnementaux sont croissants en matière de traitement des produits solaires hors réseau en fin de vie, notamment lorsqu’il s’agit d’assurer une collecte et un recyclage adéquats des déchets. Ceci est principalement dû à un manque de politiques nationales adéquates, de réglementations efficaces et d’infrastructures physiques pour gérer les déchets électroniques dans la plupart des pays africains.

Tout en poursuivant les efforts de développement pour permettre l’accès à l’énergie dans les zones rurales, le Beyond the Grid Fund for Africa (BGFA) estime qu’une action plus large et coordonnée est nécessaire pour assurer une gestion adéquate des produits solaires hors réseau en fin de vie. Le principe de base du BGFA est que, en dehors des obligations légales de reprise et de recyclage (lorsqu’elles existent), des modèles alternatifs existent ou devraient être encouragés, y compris des approches volontaires et des incitations pour encourager les consommateurs à rendre leurs produits défaillants ou en fin de vie.

Activités informelles de recyclage de déchets électroniques à Agbogbloshie, Accra, Ghana (Photo : Sofies)

La réglementation inégale en matière de déchets électroniques se traduit par des infrastructures incomplètes et inadéquates.

Les conseillers en développement durable de Sofies ont été chargés de réaliser une étude d’évaluation dans les cinq pays d’intervention afin d’orienter l’approche du BGFA en matière de gestion responsable des déchets électroniques. Ils ont constaté que :

  • seule la Zambie dispose d’un texte législatif juridiquement contraignant concernant les déchets électroniques, tandis que l’Ouganda a une politique mais pas de loi juridiquement contraignante. Au Burkina Faso, au Libéria et au Mozambique, des discussions sont en cours mais des réglementations juridiquement contraignantes sont improbables dans un avenir proche ;
  • tous les pays du BGFA sont dépourvus d’infrastructures adéquates pour la collecte et le traitement des déchets électroniques telles que des décharges appropriées pour une élimination sûre des fragments/composants non recyclables ou dangereux. Il existe cependant un secteur informel florissant de vente de matériaux de récupération, comme les composants valorisables des déchets électroniques constituent une menace grave pour l’environnement et la santé humaine des travailleurs et de la population exposée ;
  • différentes entreprises solaires hors réseau, à différents stades de leur maturité/croissance, ont des ambitions et des pratiques différentes pour relever les défis que pose une bonne gestion de la fin de vie dont : la reprise des produits, l’identification de recycleurs locaux fiables avec lesquels travailler, et le financement des opérations de collecte et de recyclage ;
  • la plupart des pays cibles ont une faible capacité de traitement, se livrant principalement à un désassemblage manuel et, dans quelques rares cas, des machines (déchiqueteuses) sont prévues pour faciliter la réduction volumétrique avant le transport des fragments. Certains recycleurs ont réutilisé des technologies de l’information et de la communication  dans le cadre d’opérations visant à combler le « fossé numérique » (par exemple, des ordinateurs pour les écoles en Ouganda). D’autres mettent en place des opérations sur la base d’expériences acquises dans d’autres pays (le cas de TCH Zambia qui s’est inspiré de l’Afrique du Sud), ouétendent leurs opérations à partir d’autres flux de déchets (par exemple, Green Cities au Libéria à partir des déchets solides municipaux et du recyclage des plastiques ou 3R au Mozambique à partir des plastiques).

Les volumes de déchets électroniques sont susceptibles d’augmenter dans les pays d’intervention du BGFA

Sofies a modélisé la production de déchets selon les produits qui devraient être mis sur le marché par le seul programme BGFA sur la période 2021-2025 (sur la base des financements prévisionnels actuellement disponibles et en incluant les volumes du BGFZ actuel) en modélisant le cycle de vie des produits vendus. Comme illustré ci-dessous, la Zambie sera de loin le plus grand émetteur de déchets électroniques, étant donné que le programme BGFZ a débuté plus tôt. Il est également possible d’estimer le volume total de batteries au lithium usagées, et les implications éventuelles sur les coûts et la logistique liée au transport de ces déchets. L’impact des mini-réseaux est négligeable en raison de la longue durée de vie de l’installation et des batteries au lithium.

Graphique : aperçu des déchets produits (t) par pays et par niveau d’accès

Promouvoir une gestion responsable des déchets électroniques à travers le BGFA

Sur la base des entretiens menés avec les bénéficiaires du BGFZ et des entreprises du secteur solaire hors réseau, ainsi qu’avec d’autres programmes et organismes de financement, Sofies a formulé des recommandations pour la promotion des meilleures pratiques en matière de gestion des déchets électroniques. De nombreux bénéficiaires actuels du BGFZ ont confirmé que les exigences des bailleurs de fonds les ont poussés à prendre en compte la fin de vie dans leurs opérations. Un certain nombre d’entre eux ont d’ailleurs  commencé à étudier les options possibles en matière de gestion des déchets. Cependant, ces options se sont souvent avérées limitées ou contraignantes et coûteuses. Parmi les raisons évoquées, le manque d’infrastructures de recyclage fiables était l’un des thèmes récurrents.

L’appel à propositions du BGFA pourrait être utilisé comme un outil pour encourager des pratiques adéquates de gestion des déchets électroniques, notamment :

  • garantir des normes de qualités strictes pour les produits et la protection des consommateurs (par exemple, le BGFZ a exigé des produits certifiés assortis d’une garantie de 3 ans pour assurer leur longévité sur le marché) ;
  • exiger des entreprises qu’elles disposent de plans de gestion des déchets électroniques, de procédures opératoires standards dans  la manipulation et le stockage, éventuellement certifiées ISO 9001 ;
  • le cas échéant, émettre des exigences en matière de gestion de la fin de vie des produits (évaluation des stocks et projections des déchets générés, établissement d’accords de partenariat pour le recyclage et opérations de reprise d’équipements) ;
  • spécifier les exigences visant à favoriser la longévité des batteries, notamment les logiciels de gestion des batteries et l’adoption de batteries au lithium ;
  • promouvoir l’engagement des parties prenantes, le renforcement des capacités et la sensibilisation des populations ;
  • soutenir la coopération à travers le secteur solaire hors réseau et celui de la gestion des déchets.

Agir ensemble

Chaque pays du BGFA devrait disposer d’une plateforme décisionnelle pour le changement destinée à ancrer le programme du BGFA dans les institutions locales du pays cible, à assurer l’appropriation locale et la participation des acteurs du marché concernés (y compris les entités gouvernementales, le secteur privé et les institutions de financement). Les objectifs de la plateforme sont d’améliorer l’attrait des services et des solutions énergétiques hors réseau, de permettre une coordination entre parties prenantes afin de promouvoir les synergies d’action et d’éviter la redondance des efforts, et d’harmoniser les politiques afin de minimiser  les distorsions du marché. Ainsi, un sous-groupe de travail pourrait être créé afin de traiter les questions juridiques et organisationnelles liées à la réglementation des déchets électroniques, à l’application de la loi ou à la fourniture d’infrastructures.

Centre de recyclage des déchets électroniques à Enviroserve Rwanda Green Park (Photo : Sofies)

Certaines activités identifiées dans le cadre de l’étude vont au-delà de ce qu’une seule entreprise peut réaliser. Elles nécessiteraient plutôt des changements structurels, à savoir :

  • des campagnes de sensibilisation ciblées ;
  • le pilotage de systèmes régionaux de reprise et de recyclage d’équipements ;
  • le financement d’équipements pour certains centres de traitement  (modernisation ou création de nouveaux centres là où il n’en existe pas) ;
  • l’établissement d’une nouvelle unité de traitement des batteries (potentiellement applicable  en Zambie) ;
  • la rédaction d’un modèle de procédures opératoires standards, de plan de gestion des déchets et d’un projet de contrat avec les partenaires de recyclage (pour tous les bénéficiaires, mais également pour être diffusés comme des ressources publiques).

Certaines de ces activités pourraient être entreprises par le BGFA individuellement tandis que d’autres nécessiteraient un partenariat avec la Suède et d’autres bailleurs de fonds, des regroupements industriels comme GOGLA et AMDA et des programmes multi-bailleurs tels que Power Africa.

En avant

Toutes ces mesures sont considérées. Pour commencer, le BGFA inclura des exigences pour que les soumissionnaires à ses appels à propositions de l’automne 2020 présentent des plans de gestion des déchets électroniques. Une assistance technique spécialisée pourra être fournie le cas échéant. Le BGFA reconnaît également le pouvoir de créativité et d’innovation de ses lauréats pour faire progresser les meilleures pratiques sur le marché. À plus long terme, le BGFA s’engage dans un processus visant à atteindre les meilleures pratiques internationales en matière de gestion responsable des déchets électroniques et à contribuer à une communauté de pratiques émergente en Afrique, en travaillant en collaboration avec les professionnels du secteur, les bailleurs de fonds et les autres parties prenantes dans les pays d’intervention.

Rédigé par Ash Sharma, responsable du programme BGFA à la NEFCO et Federico Magalini, directeur de la filiale britannique de Sofies.

Lire le rapport sur les recommandations en matière de gestion des déchets électroniques pour le programme BGFA, rédigé par les conseillers en durabilité de Sofies.


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